C’est du jazz, ou c’est autre chose ? La question est posée par les puristes
pour l’arrivée du troisième album du trio mancunien GoGo Penguin.

Depuis leurs débuts en 2012 avec Fanfares, ce groupe à su se distinguer par ses originalités musicales, composé d’une formation très
classique, avec Chris Illingworth au piano, Nick Blacka à la basse et Rob Turner à la batterie.
Très intense, la musique de trio anglais ne se classe pas facilement dans les catégories du jazz, et
leur dernier album « Man Made Object » ne déroge pas à la règle, loin de là.

Cet opus, signé chez le label mythique qu’est Blue Note, divise le milieu du jazz, la créativité du trio est
notamment remise en cause, ce dernier se revendiquant à fortes inspirations
électro, la simplicité des rythmes du piano nous le rappellent comme notre
alarme nous rappellent de nous lever.

« Man Made Object » serait-il un album de jazz acoustique effectué par/pour des robots ? Le groupe laisse planer un doute sur leur projet artistique global, et les puristes grincent des dents.

Étant personnellement un grand défenseur de l’annihilation des styles musicaux, pour laisser place à plus d’échange et d’interactions, je persiste à croire que dans sa grande
histoire, le jazz à toujours été le premier, et le plus doué pour mélanger les genres, s’inspirer de tout, et inspirer tout le monde.La présence de fortes inspirations dubstep, trip-hop et électro ne me révolte donc pas, estimant que la musique progresse à travers un mélange des genre, je trouve au contraire cette initiative excellente, surtout au vue de la rareté des projets mélangeant ces styles.

Rob Turner n’a donc aucun problème à nous présenter ses techniques de composition :

Un bon nombre des chansons de l’album proviennent de morceaux que j’ai composés avec des logiciels de séquençage comme Logic ou Ableton. Après avoir enregistrés ces maquettes, je les faisais écouter aux autres et on trouvait ensemble un moyen de les jouer avec nos instruments.

J’ai eu la chance de voir GoGo Penguin en live lors du festival Jazz à Vienne, lors de la promotion de leur opus « V2.0 », sorti en 2014.
Et déjà le trio se caractérisait par ses rythmes répétitifs, et la ligne basse-batterie particulièrement entrainante, l’énergie dégagée était alors mémorable, faisant lever l’intégralité du Théâtre.

Je pense donc que cet album, sans être de l’ordre de la révolution du style comme le fameux « The Epic » de Kamasi
Washington dans un autre registre, apporte au groupe une nouvelle dimension, éclairant leur voie pour tenter de toucher une génération peu sensible au jazz plus classique.En conclusion, « Man Made Object » déroule comme une longue mélodie, accompagnée par des rythmes détonants. L’album ne sera pas forcément comme le meilleur du trio, cependant, il fera un support exceptionnel pour une tournée qu’il s’agit de ne manquer sous aucun pretexte.